jeudi 4 janvier 2007

Exécution à la far west

Concernant la presse européenne, celle-ci a dans sa globalité estimé que la mort de Saddam Hussein ne règle aucun des problèmes auxquels est confronté l’Irak. De nombreux quotidiens ont condamné aussi la transformation en « spectacle barbare » de l’exécution de l’ancien président devant les caméras de télévision. Mais certains espèrent tout de même que la pendaison de samedi à l’aube permettra de tourner la page. L’hebdomadaire dominical allemand Bild am Sonntag a estimé que l’heure n’est pas à la « joie » ou au « soulagement », car « la mort de Saddam ne règle aucun des problèmes que la campagne militaire contre lui a créés ». « Et après ? », s’est interrogé le quotidien français Le Journal du dimanche en première page. De son avis, la condamnation de Saddam Hussein ne change rien sur le terrain. L’hebdomadaire britannique Sunday Telegraph de la droite a affirmé qu’il serait « naïf de penser que cette exécution va mettre fin à la violence interconfessionnelle qui s’est emparée de l’Irak depuis que la coalition conduite par les Etats-Unis a renversé Saddam en mars 2003 ». Cette pendaison, ajoute en outre le journal, pourrait « porter en elle le germe de la séparation nécessaire entre les loyalistes du parti Baas qui a dirigé l’Irak pendant trois décennies et les islamistes extrémistes ». L’Observer de la gauche a espéré de son côté que le Premier ministre Tony Blair va pouvoir persuader le président George W. Bush de surmonter sa réticence à demander l’aide de la Syrie et de l’Iran pour mettre fin à la violence en Irak. Pour le journal espagnol El Pais, « le gouvernement irakien a tenté sans aucun doute de réduire l’impact populaire de la mort de Saddam. Mais Baghdad n’a pas seulement perdu une opportunité de faire preuve de magnanimité dont l’Irak a désespérément besoin (...). Il a aussi raté la possibilité de juger Saddam pour ses crimes contre l’humanité », a ajouté le quotidien. El Mundo (centre droit) a jugé que « le gouvernement irakien a transformé l’exécution en spectacle télévisé » et ABC (de la droite) s’est demandé « jusqu’à quel point on peut transformer une exécution en spectacle multimédia ». Plusieurs journaux italiens qualifient de « spectacle barbare » l’exécution de Saddam Hussein. Autre écho, en Roumanie, selon l’AFP, le quotidien Evenimentul Zilei fait un parallèle avec l’exécution du dictateur Nicolae Ceusescu, le 25 décembre 1989, après un procès sommaire. La sortie complète du régime communiste « a eu aussi un lien avec une démocratie née d’une mort brutale », a souligné ce journal. En Croatie, le quotidien Jutarnji List estime que l’Irak n’avait pas d’autre choix. « Saddam Hussein a été l’un des tyrans les plus morbides du XXe siècle (...) et devait être condamné à mort dans un pays où cette peine existe. » La presse grecque a dénoncé la mise en scène « barbare » et « humiliante » dont ont fait preuve les exécuteurs de Saddam et craint que l’exécution de l’ex-président de l’Irak ne fasse imploser ce pays. « Risque de guerre civile et de conflit généralisé dans le Golfe », a titré le libéral Kathimérini. « Choc devant la barbarie » a noté le journal Elefthérotypia, pour qui la pendaison a « changé le dictateur en martyr ». En revanche, en Suède, le journal Dagens Nyheter a regretté qu’avec l’exécution de Saddam aucune des accusations majeures contre lui n’ira jusqu’à son terme. Par ailleurs, les journaux turcs, libéraux ou pro-islamistes, ont tous dénoncé la pendaison de Saddam Hussein le jour de la fête musulmane d’Al Adha. « Exécution à la far west », a souligné en page une le quotidien Aksam qui estime que ce « show », orchestré par les occupants américains, n’est pas digne des temps modernes. En Autriche, le Kronen-Zeitung estime que « l’Irak n’en deviendra pas plus pacifique et Saddam n’est qu’un mort de plus parmi tous ceux qui causent jour après jour la guerre civile ». Enfin, les journaux américains, notamment le New York Times, le Washington Post et le Los Angeles Times ont souligné que l’exécution de l’ancien président irakien Saddam Hussein, samedi à l’aube, aurait pu être un « triomphe » dans l’invasion américaine de l’Irak et pour beaucoup d’Irakiens, mais elle est ternie par la violence qui ravage le pays. Le New York Times a rappelé que la capture de Saddam Hussein, il y a trois ans, a été un moment de jubilation pour la Maison-Blanche, saluée par le président Bush dans une intervention télévisée. Ce même journal a fait remarquer que l’exécution de Saddam, en revanche, semble difficilement inspirer le même sentiment. La joie de la capture s’est évanouie, la sombre réalité en Irak change le climat pour Bush. Le Los Angeles Times estime que « l’impact de la mort d’Hussein devrait être limité. L’exécution ne fait que souligner les divisions persistantes en Irak ». Ce journal a précisé que de nombreux Irakiens et Américains ont attendu avec impatience le jour où justice sera rendue dans l’affaire Saddam Hussein. « Pourtant, quand c’est arrivé aujourd’hui, il a semblé que cela a été bien moins que le tournant historique que beaucoup attendaient. Avec un Irak ravagé par la violence et la confusion, la mort de l’ancien dictateur n’apparaît plus comme le signal du commencement d’un ordre nouveau », ajoute le quotidien. Le Washington Post est factuel sur l’exécution de Saddam Hussein.

Aucun commentaire: